OXYJEUNES 2021 : A KOSSABA, UN DÉBAT SANS TABOU AUTOUR DES VBG

Dans le cadre des activités de la 15e édition d’Oxyjeunes qui se tient actuellement à Koulikoro, les enfants parlementaires ont effectué une visite de terrain dans le village de Kossaba, une localité située dans la commune de Doumba à quelque 30 kilomètres de Koulikoro. L’objectif était la tenue d’un dialogue intergénérationnel sur le thème de la pratique de l’excision, le mariage précoce et la scolarisation des filles, bref les violences basées sur le genre. Les discussions étaient conduites par le Parlement des enfants, l’ONG TAGNE et la Direction régionale de la Promotion de la femme, de l’Enfant et de la Famille (DRPFEF), avec l’accompagnement de l’UNICEF. Une visite qui a permis un débat franc et sans tabou sur les VBG particulièrement l’excision. 

Il est 10 h 50, lorsque le bus transportant les enfants parlementaires et leurs encadreurs traverse la ville de Koulikoro puis, s’enfonce sur la grande voie vers l’Est en direction du village de Kossaba, où une grande foule les attendait déjà. Dans le bus, l’ambiance est au beau fixe : causeries, taquineries et rigolades. Après environ une heure de route, la délégation pose enfin ses pieds sur la terre de Kossaba. Sur place, une équipe de l’UNICEF qui avait devancé le reste de la délégation était déjà installée. Comme le veut la tradition, la délégation s’est rendue chez le chef de village pour les salutations d’usage. Le chef a reçu de façon symbolique un panier de Cola des mains de la délégation qui a d’emblée reçu son approbation et ses bénédictions pour les travaux.

La délégation dans le vestibule du chef de village
Le chef de village recevant sa calebasse de Cola

C’est Hussein Diallo, chargé de communication à l’ONG TAGNE qui va planter le décor. Il a d’abord remercié les participants pour leur forte mobilisation et surtout leur engagement de 2011 à 2014, autour des activités de sensibilisation. Il a ensuite fait un rappel de quelques activités menées dans le cadre de la lutte contre l’excision, le mariage précoce et la non-scolarisation des jeunes filles. Situant la rencontre dans son contexte, il dira qu’il s’agira de mener des discussions autour des pratiques ancestrales telles que l’excision, le mariage précoce. Les enfants parlementaires vont alors s’imprégner de ces réalités autour d’un débat. A sa suite, le conseiller du chef de village va à nouveau souhaiter la bienvenue à toute la délégation avant de céder la place au présidium pour la suite des travaux. Le présidium était composé de Mlle Lala Maïga, présidente du parlement des enfants de Koulikoro ; de Mme. Bocoum Awa Guindo, directrice régionale de la Promotion de la femme, de l de l’Enfant et de la Famille et de Mama Coulibaly, conseillère à la municipalité de Doumba.

Le présidium

A l’entame de ses propos, Mlle Lala Maïga dira que depuis 30 ans, des actions sont menées pour mettre fin aux vieilles pratiques comme l’excision. Cependant, beaucoup restent à faire dira a-t-elle. À la question de savoir quelles sont les réalités de l’excision, Fatoumata Diabaté, animatrice à l’ONG TAGNE qui a travaillé sur plusieurs programmes concernant les violences basées sur le genre. Pour elle, la pratique de l’excision remonte à plusieurs siècles. C’est une tradition qui a été perpétuée, sinon elle n’a aucun avantage sur la vie de la femme, ni du côté santé, ni celui du mariage ou autres. Au contraire, soutient-elle, sa pratique pose énormément de problème comme les difficultés liées à l’accouchement, les maladies infectieuses, etc.Sur la même question, Mme Bocoum, va plus loin pour expliquer que les problèmes liés à ces pratiques et conséquences sont incalculables sur la vie des femmes. Pour elle, la pratique n’est basée sur aucun fondement. « Dans le cadre de la sensibilisation, nous avons mené des enquêtes même au niveau des religieux pour savoir si la pratique de l’excision avait un fondement religieux. Les résultats sont unanimes : la religion n’y est pour rien. Même à Tombouctou, un des bastions de l’islam, la pratique de l’excision n’est pas connue. Les conséquences de l’excision sont énormes. Nous avons vu des accouchements difficiles, des femmes souffrantes de fistule, qui est parfois même la cause des divorces », lance Sitan Traoré, une participante. Et d’ajouter : « de nos jours, nous avons abandonné la pratique », s’est-elle félicitée.

Des oreilles attentives
Les enfants parlementaires dans le village de Kossaba

Pour le Conseiller du chef du village, Otian Diarra, la pratique a cessé à Kossaba depuis 2014. Les villageois ont même signé un protocole d’accord pour matérialiser leur volonté d’arrêter la pratique. La conseillère municipale aborde dans le même sens, « les sensibilisations sur les conséquences des pratiques de l’excision, le mariage précoce et la non-scolarisation des jeunes filles ont permis d’amener les populations à l’abandonner », s’est-elle réjouie. Elle a ensuite conseillé d’activer les comités de veille afin d’éviter que les filles soient mutilées puis retirer de l’école. La directrice régionale de rebondir: «Nous avons initié des discussions inter villageoises sur la pratique et procédé à des renforcements de capacités à tous les niveaux».L’assistance retient son souffle, lorsque Yeba Ballo prend la parole. En effet, Yeba est une ancienne exciseuse qui a appris la pratique avec sa mère et l’a assisté durant 20 ans. Aujourd’hui, elle témoigne avoir arrêté d’exciser suite à des sensibilisations et la réalité qu’elle a expérimentée.  Amaïchata Salamanta, artiste, conteuse et présidente de l’association culturelle N’Ga bolo Hen, a,  part son talent émerveillé l’assistance. Les participants n’ont pas voilé leur émotion lorsqu’elle conte l’histoire tragique d’une petite qui a été mutilée.

Amaissata Salamanta, artiste, conteuse en prestation accompagnée par les femmes du village

A ce jour, dans la région de Koulikoro, 140 villages ont abandonné l’excision. Les parlementaires ont, à travers ce débat cerné les réalités sur les VBG et se sont engagés à joueur désormais leur partition pour l’épanouissement de la femme. 

Amadingué SAGARA à Koulikoro

 

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