ONG AFIP : « NOUS TRAVAILLONS POUR LA RECONSTRUCTION DU TISSU SOCIAL TRÈS ENTAMÉ, DANS LES ZONES OÙ NOTRE VOIX EST AUDIBLE…», DIXIT LA PRÉSIDENTE FATOUMATA MAÏGA

L’ONG Association des femmes pour les initiatives de paix (AFIP) a été créée le 03 février 1998 et a reçu son Accord cadre le 25 avril 2000. Elle travaille sur les questions de paix et sécurité à travers le renforcement des capacités des populations dans le règlement de leurs différends par le dialogue et la non-violence, à travers un cadre intégré de développement. AFIP organise des ateliers et foras au niveau national et régional sur les instruments relatifs au contrôle des armes. La résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la femme et la jeune fille, dans les situations de conflits, la prévention des conflits à travers les mécanismes de l’alerte précoce de la CEDEAO entre autres. L’ONG est membre de plusieurs réseaux et structures nationale, régionale et internationale. Fatoumata Maïga est la présidente de AFIP, nous l’avons rencontré pour vous.

NYELENI Magazine : Parlez-nous de votre association ?

Fatoumata Maïga : Notre organisation travaille sur la promotion de la paix et la sécurité, avec pour mission entre autres de former, éduquer et conscientiser les communautés à régler leurs différends par le dialogue et non la violence armée. Nous travaillons pour la maîtrise et la vulgarisation des textes relatifs à la lutte contre l’utilisation des armes par les communautés et leurs dangers, pour la stabilité communautaire et nationale. Nous travaillons pour la reconstitution du tissu social très entamé dans les zones où notre voix est audible et même hors du pays si nous sommes sollicitées.

NYELENI Magazine : Quelles sont ces grandes rencontres de négociation auxquelles les femmes ont participé ?

Fatoumata Maïga : Les femmes du Mali de manière individuelle et collective ont participé à plusieurs rencontres pour faire le plaidoyer pour un Mali en paix et en sécurité. S’agissant des négociations, elles étaient aux rencontres de Ouagadougou, aussitôt après la chute des régions de Gao, Kidal et Tombouctou. La toute première date d’avril 2012, qui a porté sur l’Accord cadre, sur proposition des femmes leaders et avec l’appui financier de ONU femmes, les présidentes de la CAFO, de FEMNET, de RESFECO Mali et de l’AFIP, ont participé à cette importante rencontre. En septembre 2014, lors de l’écoute des populations à Alger, dix-huit (18) femmes issues des groupes armés, de la Société civile, des syndicats et des élus, dont quatre (4) de la plateforme des femmes du Mali avec l’appui du Ministère de la Réconciliation ont participé aux écoutes, à savoir : Diallo Diedia kattra et Rahmatou Ansari, au nom de la région de Tombouctou, Famma wallet Idal, au nom de Kidal et ma modeste personne au nom de la région de Gao. Il faut reconnaître que les femmes du Mali ont produits des documents de propositions dans le cadre des activités de dialogue pour la paix du pays, mais aussi aux rencontres préparatoires des négociations d’Alger, jusqu’à la signature de l’Accord le 15 mai 2015.

NYELENI Magazine : Les femmes ont-elles été solidaires dans cette lutte contre l’extrémisme violent ?

Fatoumata Maïga : Effectivement les femmes du Mali et surtout celles du centre et des régions de Gao Ménaka sont très actives dans la lutte contre l’extrémisme violent. A savoir la lutte contre l’endoctrinement des femmes et l’enrôlement des enfants avec leur modeste dans un cadre informel, parce qu’un cadre formel ne semble pas exister, ce qui n’est pas pour faciliter l’atteinte de résultats, donc les décideurs doivent penser à la création de ce cadre. Les femmes doivent travailler à réduire le nombre de femmes endoctriner et l’enrôlement des enfants soldats par les groupes extrémistes, chacune selon ses compétences, de manière collective et individuelle en la matière.

NYELENI Magazine : Pour renforcer la participation des femmes dans la prévention de l’extrémisme violent, que faut-il faire ?

Fatoumata Maïga : Pour renforcer la lutte contre l’extrémisme violent, il est important de bien comprendre leur motivation, la discours, le système de communication, les cibles et surtout les moyens et canaux de survie ou de financement. Les femmes doivent avoir de bonnes capacités d’analyse de la situation, une capacité de communication en relation avec la situation et comment éviter les risques pour soi-même et les proches, comme en période de conflit violent et un bon leadership. Il est important de travailler dans un cadre coordonné, afin de réduire les vulnérabilités sociales économiques et même spirituelles, à travers un dialogue social.

NYELENI Magazine : Pourquoi dit-on que la promotion de l’autonomisation socioéconomique peut soustraire les femmes de l’influence des groupes extrémistes

Fatoumata Maïga : L’autonomisation socio-économique des femmes est un moyen parmi tant d’autres pour réduire l’endoctrinement des femmes et même l’enrôlement des enfants, mais il faut voir du côté religieux qui mobilise, vu que la grande majorité des Maliens pratique l’Islam sans formation idéologique, c’est-à-dire, sans connaître réellement la religion. Cette faille est malheureusement exploitée par les djihadistes.

NYELENI Magazine : Des femmes ont-elles été auteures ou complices dans l’extrémisme violent au Nord ?

Fatoumata Maïga : Les femmes du Nord comme celles des autres régions du Mali, sont actrices activées ou souvent par simple ignorance. Prenons le cas de celles qui vendent les matières premières, qui rentrent dans la fabrication des engins explosifs improvisés, toutes celles qui ont été arrêtées ne sont pas du Nord. Celles qui approvisionnement les groupes en carburant, céréales, engins roulants ne sont pas de cette partie du pays. Là-bas, ils y’a une autre forme de soutien, peut être politique, relationnel ou spirituel…etc. Malheureusement, d’autres le font sans connaître la gravité.

NYELENI Magazine : Quelle est aujourd’hui, la situation des femmes qui étaient mariées à des djihadistes ?

Fatoumata Maïga : S’agissant des femmes mariées aux djihadistes, certaines ne vivent plus, d’autres sont encore dans les liens du mariage, d’autres aussi, ont pu se libérer, mais très traumatisées, malheureusement le phénomène a continué, soit par la force, soit par ignorance. C’est après une arrestation, ou un décès lors des opérations, que la femme découvre la face cachée de son conjoint.

NYELENI Magazine : Un dernier mot à l’endroit de tous les Maliens et surtout des femmes ?

Fatoumata Maïga : J’invite les Maliens et les Maliennes à mettre la cohésion sociale entre les maliens et la lutte contre l’extrémisme violent, au centre de leurs priorités, toutes tendances politiques sociales ou religieuses mises de côté. Aux femmes du Mali, à s’engager d’avantage, à se mobiliser contre l’extrême violence, comme moyen d’expression et surtout l’endoctrinement des femmes et l’enrôlement des enfants, comme acteurs de violences, avec comme partenaires privilégiés les érudits issus du courant tolérant, soutenus par un engagement politique au plus haut niveau.

Tout cela ne sera possible que si nous renonçons au combat de positionnement et de leadership.

Je vous remercie

Propos recueillis par Maïmouna TRAORÉ

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *