JANVIER DES GRANDES DÉCISIONS

AU SOMMET DES NON-ALIGNÉS : LE MALI DIT NON À TOUTES FORMES D’INGÉRENCE

Du 19 au 20 janvier s’est tenu à Kampala le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement du Mouvement des non-alignés, la délégation malienne y a pris part.

Le document final produit n’ayant pas tenu compte des amendements formulés par le ministre des Affaire Étrangères et de l’Intégration africaine, M. Abdoulaye Diop, le ministre d’État, ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, porte-parole du Gouvernement, Colonel Abdoulaye Maïga, a dans son discours dénoncé l’ingérence d’un pays, dans les décisions du Sommet des non- alignés. Pour le Colonel Abdoulaye Maïga « La délégation malienne a effectué un vol d’environ 06 h de temps sans escale, pour honorer l’invitation qui nous a été adressée par Votre Auguste personne.

Ceci dénote également du profond respect de S.E. le Colonel Assimi GOITA à votre endroit. Il est de mon devoir d’appeler Votre haute attention sur une entorse grave à l’usage diplomatique dont nous avons été l’objet. En effet, en réaction au projet de document final, notre Ministre des Affaires Étrangères a formulé des amendements, qui ont été refusés par je ne sais qui, et au nom de je ne sais quoi. Malgré sa vive protestation lors de la conférence des Ministres des Affaires Étrangères, la situation ne semble pas avoir évolué.

Il est toujours utile de rappeler que le sommet des non-alignés a un A.D.N qui lui est propre, cette particularité explique son succès et sa longévité, malgré les tensions politiques. Rejeter les amendements d’un État membre sur un sujet qui concerne d’abord et avant tout cet État lui-même est un fait suffisamment grave, qui alerte sur le danger qui guette notre organisation commune face aux velléités d’un pays d’imposer son agenda et s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres États.

Le Chef de l’État du Mali que j’ai l’honneur de représenter ici, ne le comprendrait pas, le peuple malien dont nous défendons les intérêts vitaux, ne le comprendrait pas non plus. Cet incident de parcours est d’autant plus incongru que nous nous trouvons en terre africaine d’Ouganda, l’un des symboles forts de l’émancipation africaine et de la défense de la souveraineté nationale, avec la figure emblématique qu’incarne le Président Museveni en Afrique et dans le monde.

Par conséquent, à défaut de prendre en compte les amendements du Mali, tels que proposés par notre Ministre des Affaires Étrangères, le Mali se dissocie totalement de la rédaction proposée et exige un retrait pur et simple du chapitre qui lui est consacré dans le projet de document final sur les résultats du Sommet de Kampala.

A l’avenir, il est important de revoir le fonctionnement de notre Mouvement, pour plusieurs raisons : lorsqu’un chapitre porte sur un État membre, il est important d’obtenir par écrit le consentement de l’État, ainsi que le pays qui est à l’origine du projet de chapitre. Les règles et les procédures ne peuvent pas être plus importantes que la souveraineté des États membres. Sans changement de ces règles, il y a une forte probabilité de raser la tête d’un État membre en son absence et sans son consentement, ce qui ressemble à de la sorcellerie ».

DÉNONCIATION DE L’INGÉRENCE DE L’ALGÉRIE DANS LES AFFAIRES INTÉRIEURES DU MALI

Par le communiqué numéro 64 du 25 janvier du Gouvernement de la Transition, trois jours après le Sommet des non-alignés, le Mali Dénonce à nouveau l’ingérence de l’Algérie Par ce communiqué, le Gouvernement de la Transition démontre point par point les multiples « actes inamicaux, de cas d’hostilité et d’ingérence dans les affaires intérieures du Mali par les autorités de la République Algérienne Démocratique et Populaire, toutes choses portant atteinte à la sécurité nationale et à la souveraineté du Mali ». Le Gouvernement dénonce entre autres :

« L’imposition d’un délai de Transition aux Autorités maliennes, de manière unilatérale ; L’accueil sans concertation ou notification préalable et au plus haut sommet de l’État Algérien de citoyens maliens subversifs et de citoyens maliens poursuivis par la justice malienne, pour actes de terrorisme ; L’existence sur le territoire algérien de bureaux assurant la représentation de certains groupes signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, devenus aujourd’hui des acteurs terroristes;

La volonté des autorités Algériennes à maintenir le régime de sanctions des Nations Unies concernant le Mali, au moment où̀ le Mouvement des Non Alignés et la Fédération de Russie s’y opposaient dans l’intérêt du Mali qui demandait la levée dudit régime ; La main cachée des autorités Algériennes dans une manœuvre consistant à imposer un chapitre sur le Mali dans le document final du sommet du Mouvement des non-alignées à Kampala, en Ouganda, sans le consentement des Autorités maliennes.

À l’argument des autorités Algériennes selon lequel, elles ne sont pas à l’initiative du Chapitre contesté sur le Mali, il est utile de leur demander la raison pour laquelle elles ont été les seules à s’opposer, au niveau des experts, à l’amendement proposé par le Mali, en affirmant que toute modification de la rédaction contestée devrait recueillir, au préalable, l’assentiment des plus hautes autorités Algériennes. Après analyse de ces cas, il ressort une perception erronée des autorités Algériennes qui considèrent le Mali comme leur arrière-cour ou un État paillasson, sur fond de mépris et de condescendance.

Par ailleurs, le Gouvernement de la Transition prend à témoin l’opinion nationale et internationale et les invite à constater l’écart entre les manœuvres d’hostilité des autorités Algériennes d’une part et d’autre part la responsabilité qui leur incombe au moment où̀ elles siègent au sein du Conseil de Sécurité des Nations Unies, l’instance chargée principalement du maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Le Gouvernement de la Transition, tout en condamnant cette attitude, exige des autorités Algériennes de cesser immédiatement leur hostilité. En outre, les relations de bon voisinage exigent des comportements responsables, qui doivent être guidés par le sens de l’empathie et le respect mutuel.

Le Gouvernement de la Transition serait curieux de savoir le sentiment des autorités Algériennes, si le Mali devrait accueillir au plus haut sommet de l’État, des représentants du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie ». Le Gouvernement de la Transition a rappelé aux autorités Algériennes « les relations séculaires et fraternelles qui existent entre le peuple malien et le peuple algérien.

L’un des points majeurs de l’amitié entre les deux peuples frères remonte à la guerre d’Algérie, lors de laquelle, le Mali a notamment : Offert son territoire comme base arrière aux Moudjahidines, ouvrant ainsi un front sud; Participé aux affrontements armés contre le colonisateur français, en déployant des combattants maliens aux cotés des Moudjahidines, sur le territoire algérien pour défendre la liberté et la dignité des Algériens; Défendu la cause algérienne dans toutes les instances diplomatiques, jusqu’au recouvrement de leur indépendance. »

Le Mali a invité les autorités Algériennes à se remémorer également leur responsabilité dans la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel. « S’il est vrai que l’intervention de l’Organisation du Traité de l’Atlantique nord (OTAN) a exacerbé la menace terroriste, il n’en demeure pas moins que c’est l’installation dans le Sahara du Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) algérien, puis son allégeance à Al-Qaida qui marquent l’avènement du terrorisme international dans la région .

Le Mali réaffirme son attachement à la promotion des relations amicales et harmonieuses avec l’ensemble des États du monde, sous réserve du respect des principes guidant l’action publique au Mali, définis par Son Excellence Le Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition, Chef de l’État, à savoir: Le respect de la souveraineté́ du Mali ; Le respect des choix de partenariat et des choix stratégiques opérés par le Mali; La prise en compte des intérêts vitaux du Peuple malien dans toutes les décisions. »

LA FIN DE L’ACCORD DE PAIX ISSU DU PROCESSUS D’ALGER

Après le constat de l’inapplicabilité absolue de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, le Gouvernement a mis fin audit accord le 25 janvier 2024, par le communiqué numéro 65.

« Le Gouvernement de la Transition, dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, signé en 2015, partage avec l’opinion nationale et internationale les faits graves, ci-dessous :

1. Le changement de posture de certains groupes signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, devenus des acteurs terroristes et poursuivis par la justice malienne, après avoir commis et revendiqué des actes terroristes ;

2. L’incapacité de la médiation internationale à assurer le respect des obligations incombant aux groupes armés signataires, malgré les plaintes formulées par le Gouvernement de la Transition, à travers la lettre du Ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation nationale, en date du 24 Février 2023, adressée aux Autorités de la République Algérienne Démocratique et Populaire, chef de file de la médiation internationale ; .

3.Les actes d’hostilité et d’instrumentalisation de l’Accord de la part des Autorités Algériennes dont le pays est le chef de file de la médiation, tels que mentionnes dans le communiqué n°064 du 25 janvier 2024 du Gouvernement de la Transition.

Au regard de ces faits suffisamment graves précités, le Gouvernement de la Transition constate l’inapplicabilité́ absolue de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, signé en 2015 et par conséquent, annonce sa fin, avec effet immédiat. Le Gouvernement de la Transition rassure de sa volonté́ à œuvrer pour le règlement pacifique de la crise malienne, en tirant les enseignements des accords précédents et en consolidant leurs acquis.

En outre, il invite tous les autres groupes signataires du caduc accord de paix, non impliqués dans le terrorisme, ainsi que les partenaires du Mali à s’inscrire dans l’esprit du dialogue direct inter-malien ouvert à tous nos compatriotes épris de paix, annoncé par Son Excellence Le Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition, Chef de l’État, le 31 Décembre 2023.

Le Gouvernement de la Transition saisit cette occasion pour appeler les maliens à renforcer la cohésion nationale et à promouvoir le dialogue et la paix. »

LE RETRAIT DE L’AES DE LA CEDEAO

Le 28 janvier, dans l’intérêt de leurs peuples, après mûre réflexion, les gouvernements du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont annoncé leur retrait de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), avec « effet immédiat ». Ce retrait fait suite à une longue déception des trois pays, face aux agissements de l’organisation régionale, sensée défendre leur intérêt commun.

Les trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont dans un communiqué commun, expliqué que la CEDEAO s’est éloignée des idéaux des pères fondateurs et du panafricanisme qui ont inspiré sa création il y a 49 ans. L’AES voit une trahison des principes fondamentaux de l’organisation et une ingérence des puissance étrangères, elle devient alors une menace et non une force de développement et de solidarité régionale.

Le retrait des trois pays de la CEDEAO a été présenté comme une décision souveraine et responsable, prise en réponse aux attentes, préoccupations et aspirations de leurs populations respectives. Les dirigeants ont souligné qu’ils assumaient pleinement leurs responsabilités devant l’histoire et qu’ils agissaient dans l’intérêt supérieur de leurs pays.

LES RAISONS ET AVANTAGES DU RETRAIT DE LA CEDEAO

Le 29 janvier 2024, le Chef de l’État, Son Excellence le Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition, a présidé un Conseil extraordinaire des ministres dans la salle des banquets du palais de Koulouba. L’ordre du jour portait sur les raisons et les opportunités du retrait du Mali et des autres pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, M. Abdoulaye DIOP, a souligné que le retrait des trois pays, le Mali, le Burkina Faso, et le Niger, de la CEDEAO était une décision nécessaire en raison de la menace que cette organisation représentait pour la souveraineté et les intérêts vitaux de ces nations.

Il a indiqué que la CEDEAO avait été détournée de ses principes fondateurs et utilisée contre les institutions, les États, et les populations des pays membres. DIOP a ajouté que les Chefs d’État avaient pris cette décision dans l’intérêt de la survie des pays concernés, mettant en avant les trois principes énoncés par le Président de la Transition :

le respect de la souveraineté du Mali, le respect des choix stratégiques et des choix des partenaires opérés par le Mali, la défense des intérêts vitaux du peuple malien dans les décisions prises.

Il a aussi souligné la nécessité pour les pays de travailler dans leur intérêt, en dehors des influences extérieures néfastes.

Pour sa part, le ministre de l’Économie et des Finances, M. Alousséni SANOU, a expliqué les opportunités économiques que ce retrait offrait aux pays de l’Alliance des États du sahel. Il a mis en avant la possibilité de développer un marché intérieur fort, stimulant la croissance économique et assurant une autonomie politique et économique. M. SANOU a également souligné les avantages financiers, notamment en termes de balance commerciale et d’investissements directs étrangers, qui découleraient de cette décision. Il a insisté sur la flexibilité nouvellement acquise pour négocier avec d’autres pays et la capacité de protéger les entreprises locales.

Le ministre de l’Économie et des Finance a ensuite rappelé que le Mali avait surmonté des défis par le passé et exprimé sa confiance dans la résilience et l’intelligence du pays pour prendre en main son destin. Les ministres ont souligné que cette décision de retrait de la CEDEAO ouvrait des perspectives considérables pour l’autonomie politique et économique des pays de l’AES, tout en soulignant la nécessité de travailler ensemble pour concrétiser les objectifs de refondation initiés par les plus hautes autorités.

LA RÉACTION DE LA CEDEAO

Communiqué du Président de la Commission de l’Union Africaine sur le Retrait de Trois États Membres de la CEDEAO

janvier 30, 202

4 Le Président de la Commission de l’Union Africaine S.E Moussa Faki Mahamat a appris avec un profond regret l’annonce du retrait du Mali, du Niger et du Burkina Faso de la CEDEAO. Le Président de la Commission de l’Union Africaine appelle à la conjugaison de tous les efforts pour que l’Unité irremplaçable de la CEDEAO soit préservée et la solidarité africaine renforcée.

Le Président de la Commission de l’Union Africaine engage les leaders régionaux à intensifier le dialogue entre le leadership de la CEDEAO et les trois pays susmentionnés. Il exprime à ce sujet l’entière disponibilité de la Commission de l’Union Africaine pour apporter tout le concours en son pouvoir pour le succès de la logique de dialogue fraternel, loin de toutes les interférences extérieures d’où qu’elles viennent.

Sources: Communiqués/Gouvernement, Ministère de l’Intérieur et CEDEAO

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