COULIBALY OUMOU DIARRA N’EST PLUS, L’ANIMATRICE S’EST ÉCLIPSÉE, L’ICÔNE DEMEURE ÉTERNELLE

La grande faucheuse n’a pas été tendre avec la famille de la presse malienne en fin d’année 2023. Dans l’intervalle de trois jours, elle lui a arraché trois baobabs, trois références… Il s’agit d’Amadou Konaté (précédemment Chargé de Mission à la Cellule de Communication et des Relations Publiques de la Présidence de la République) le dimanche 24 décembre 2023 ; Almamy Samory Touré (PDG du groupe Liberté, Radio et TV) le lundi 25 décembre 2023 et Coulibaly Oumou Diarra (animatrice à l’ORTM, comédienne et coache) le mardi 26 décembre 2023. Nous nous attardons dans ces lignes sur Oumou Diarra dite Dièman ou Djèman (la Blanche) car elle fut une amazone du micro, des ondes, des plateaux TV, des écrans, des scènes… Une vraie gardienne de nos valeurs socioculturelles.

 « Une femme de grand talent nous quitte » ! « Une conseillère hors pair » ! « Une autre grande voix de radio Mali nous quitte. C’est vraiment une perte cruelle » !  « Une grande dame vient de partir » ! « Une grande voix de la radio vient de s’éteindre à jamais » … Les hommages et les commentaires n’ont pas cessé de pleuvoir depuis l’annonce du décès de Coulibaly Oumou Diarra à l’aube de ce triste mardi 26 décembre. Depuis son hospitalisation en juin 2016, les fausses rumeurs sur sa disparition ont fréquemment enflammé la toile. C’était sans compter sur la pugnacité de cette brave dame qui n’a pas abandonné sa passion malgré une santé fragile. Mais, hélas, elle a été vaincue ce 26 décembre 2023 dans ce combat inexorablement perdu d’avance par tous les mortels.

De la Radio Kayira à la Chaîne II de l’Ortm, elle a toujours brillé par son talent, son professionnalisme et son humour. Née en 1965 à Ségou et mère d’un enfant, Dièman est diplômée de la section douane de l’Ecole centrale pour l’industrie, le commerce et l’administration (ECICA). Mais, c’est sa passion pour la radio et la comédie qui l’emportent et qui ont fait d’elle l’une des personnalités les plus influentes des médias au Mali, voire sur le continent. Et cela à travers des émissions à succès comme « Ginguin Grin » (co-animé avec le défunt Michel Sangaré), « Sôgôma dolo » (l’étoile du matin), « Kôlônsen Kôrôla » (au pied des mortiers), « Madame Dioukousse », « Biribara Ton » (chronique satyrique sur les femmes insalubres), « Niéléni », « Yelen» (lumière), «Gwa kunda» (avec Lamine Sissoko et Lalla Drabo dite Fiman)… puis «20/20» qui a réellement fait sa célébrité comme conseillère conjugale, coache. Elle a d’ailleurs choisi de tirer sa révérence le jour (mardi) où elle animait cette émission fétiche dont l’audience ne cessait de croître.

Le chantre de l’harmonie conjugale qui a évité la rupture à de nombreux couples

Duran près de 30 ans, Dièman a conseillé, éduqué et sensibilisé des milliers d’auditeurs à la Radio Kayira, Tabalé et, enfin, à la Chaîne II de l’Ortm où sa voix a illuminé le monde des médias à partir du début des années 2000. Animatrice, productrice et comédienne, Oumou Diarra s’est éclipsée des ondes après avoir marqué son temps en rendant un service inestimable à la nation et à la société. En véritable icône du micro, elle fut le chantre de l’harmonie conjugale, de la cohésion dans les familles et du vivre ensemble. A travers son émission culte, «20/20 », elle a sauvé un nombre incalculable de couples à travers ses conseils, particulièrement en direction des jeunes mariées.

Grâce à Oumou, elles sont nombreuses ces jeunes mariées qui ont compris ce qu’était le mariage, comment se comporter dans sa belle-famille et en société ; comment s’occuper de son foyer en surmontant les difficultés, les épreuves qui ne manquent pas dans un foyer quel que soit le degré d’amour qu’on a l’un pour l’autre… Oumou Diarra a toujours prêché l’entente et la cohésion au sein de nos familles. Et cela en s’appuyant sur nos valeurs socioculturelles. Humble et modeste, elle avait l’humour dans le sang et savait informer, sensibiliser, éduquer et plaider sans passion, sans offenser ou frustrer. Chaque couche de notre société et chaque membre de nos familles pouvaient aisément se retrouver dans ses messages et conseils véhiculés avec une conscience professionnelle à toute épreuve. On comprend alors pourquoi ses émissions à la télé ou à la radio, notamment «20/20 », battaient tous les records d’audience.

Et c’était aussi, le cas des émissions dans lesquelles elle était fréquemment invitée par nos confrères et consoeurs. Comme le disait un admirateur inconsolable, Oumou Diarra fut « une authentique bibliothèque qui a su remplacer les vieilles de notre société traditionnelle…». Et d’ajouter, «de nombreuses jeunes filles t’ont choisie comme confidente et mentor, afin de comprendre les contours et méandres de la vie de couple. Et tu as accepté assumer cette responsabilité avec grande humilité ». C’est dire que l’illustre défunte était devenue à juste titre une référence, un guide voire une coache (au sens noble du terme) pour les Maliennes.

Sa disparition est incontestablement une lourde perte pour la gent féminine du Mali. « J’aimais l’écouter jusqu’au bout en laissant de côté tout ce que je savais ; j’aimais la comprendre au-delà de ce qu’elle disait et, à chaque fois, je trouvais une belle logique derrière ses propos que nous autres femmes dites modernes ne perçoivent pas toujours », témoigne une admiratrice. Et d’avouer, «je la compte parmi les femmes qui m’ont profondément inspiré et qui ont eu un impact positif sur la femme que je construis en moi, chaque jour, un peu plus. Elle a fait sa part de façon honorable ».

La soif d’apprendre pour se perfectionner afin de mieux servir

« Elle était une grande sœur, une collaboratrice, une conseillère, une marraine, une amie, mon élève. Mon professeur », témoigne Alioune Ifra N’Diaye, réalisateur et entrepreneur culturel. Et d’ajouter, « elle tenait à avoir un niveau universitaire. J’en suis devenu le professeur obligé. Tellement de nuits blanches pour expliquer des concepts universitaires. Tellement de nuits blanches pour qu’on s’entende sur des notions traditionnelles et modernes. Tellement de temps de travail ensemble pour écrire des spectacles et des émissions de télévision comme Sourakamousso Lalley, A nous la Citoyenneté, Manyamagan, Gorobiné ton…».

Le promoteur de « Blonba » (le grand vestibule) est convaincu, « tu seras au paradis parce que tu as réglé le problème de tellement de ménages ! C’est chez toi que j’ai compris que les femmes souffrent au Mali. C’est chez toi que j’ai compris le traumatisme du pays. Ta porte était ouverte aux femmes pour qui tu étais la Manyamagan (conseillère conjugale) permanente ». Un rôle qu’elle a joué à merveille avec discrétion et humilité. « Je garde un bon souvenir de Oumou, une femme joviale et disponible. Que le bon dieu l’accepte dans son paradis Firdaws », souligne notre consoeur Haby Diallo. « Nous rendons hommage à Tante Oumou Diarra dite Dièman, une femme d’esprit et de bonté qui restera à jamais gravée dans nos cœurs », a déclaré le célèbre humoriste Souleymane Kéita dit « Kanté ».

« Tu savais nous faire rire tout en nous prodiguant de bons conseils. Tu as innové sur les ondes et tu as su embarquer avec toi des milliers d’auditeurs et de téléspectateurs qui attendaient impatiemment chaque nouveau numéro de tes émissions tout en appliquant les conseils des précédents », reconnaît notre consoeur de l’Ortm, N’Deye Sissoko. « Grâce à toi, nous avons complété nos connaissances en savoir-être et savoir-vivre. Tu étais une véritable école. Tu nous invitais à revisiter les astuces de Grand-mère pour être de meilleures personnes. Beaucoup de couples ont été sauvés grâces à tes conseils avisés. Des fraternités et amitiés ont été sauvées », avoue-t-elle.

Elle nous a procuré de la joie dans nos familles et elle a consolidé nos foyers par ses précieux conseils. On comprend alors aisément pourquoi Dièman pouvait légitimement revendiquer au moins 25 homonymes (en 2022) en dehors de sa propre famille. En un peu plus de 30 ans de carrière, elle n’a pas utilisé son talent, son influence et le micro pour se servir, mais pour se mettre au service de sa communauté, de sa société et de la nation.

« Je n’ai pas d’argent mais, je suis riche de mes relations. Quand je suis tombée malade (en 2016), il y a eu une très forte mobilisation autour de moi. Ce qui est, à mon avis, la plus grande et la plus précieuse des richesses que l’on puisse avoir ici-bas », avait-elle déclaré dans l’hommage que l’ORTM lui avait consacré à l’occasion du 8 Mars 2022. Il faut rappeler que la célèbre Dièman est « Médaillée de l’Etoile d’argent du mérite national effigie Abeille » depuis mai 2017. Mais nous savons tous, chacun en âme et conscience, qu’elle méritait plus comme reconnaissance de la part de la nation.

En tout cas, la disparition de Coulibaly Oumou Diarra dite Dièman (la seule à pouvoir rivaliser en beauté avec Mme Touré Lobo Traoré, l’ex Première Dame du pays) est une perte immense pour le pays, car cette courageuse dame s’est beaucoup investie dans la défense et la vulgarisation de nos valeurs socioculturelles !

Puisse Dieu lui réserver le Firdaws comme demeure éternelle au paradis !

AMEN

Moussa BOLLY

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