ANNA DAO, AUTEURE DU LIVRE « FINDING LALLA’S ANNA »: « CHERCHE DIEU ET CESSE DE REGARDER LES HUMAINS » DISAIT MA GRAND-MÈRE

Anna Dao est une malienne résidant aux USA, elle vient de publier un livre sur l’éducation reçue de sa grand’mère Lalla Soucko. Son livre s’intitule « Finding Lalla’s Anna » que vous pouvez traduire par « Retrouver la Anna que Lalla voyait ». Née à Paris, Anna Dao a commencé le cycle primaire à l’école Liberté À de Bamako en 1969. Un père diplomate, sa famille séjournera à l’étranger de 1970 à 1974. Elle continuera son second cycle toujours à Liberté À. En 1978, la famille repart pour le Canada, de retour en 1981, Anna Dao entame ses études à l’École des hautes études pratiques (EHEP), d’où elle sort avec un diplôme de Secrétaire de direction bilingue.
Anna Dao a travaillé au PNUD et à l’UNICEF comme secrétaire et au PAM comme Assistante Administrative. Pendant les années du PAM, Anna produisait et animait une émission « Affaires Publiques » à Radio Klédu. Elle rédigeait également des articles pour le journal « Le Républicain». C’est en fin 1993, qu’elle quitte le Mali pour New York, où elle vit et travaille toujours.

NYELENI Magazine : Vous avez récemment publié un livre, de quoi parle-t-il?
Anna Dao : C’est un mémoire-hommage. Je parle de ma quête de vérité et de spiritualité pour donner un sens et une direction à mes choix et décisions. La vie d’immigrée n’est pas facile. Et dans mon récit, je rends hommage à feue ma grand-mère maternelle (paix à son âme), qui s’est efforcée durant toute sa vie à m’inculquer les valeurs traditionnelles qui allaient m’aider à donner un sens à ma vie.

NYELENI Magazine : Il y a vos parents, pourquoi écrire spécialement sur votre grand-mère ?
Anna Dao : C’est vrai, je remercie Dieu pour mes parents et toutes les bonnes personnes qui ont contribué à faire de moi ce que je suis aujourd’hui. Cela dit, j’avais une relation spéciale avec ma grand-mère. Je ne peux pas vraiment expliquer, parce l’amour inconditionnel ne s’explique pas. Tout ce que je peux dire, c’est qu’elle me connaissait mieux que moi-même. Très tôt, elle m’a parlé de son enfance, de sa vie, pourquoi elle aimait telle chose, et pourquoi elle n’aimait pas telle autre chose. Elle m’encourageait à lui poser des questions auxquelles elles répondait toujours très honnêtement.

NYELENI Magazine : Que pouvez-vous nous dire de ce qu’on a perdu de l’éducation traditionnelle qui pouvait encore maintenir la cohésion dans nos sociétés ?
Anna Dao : La pudeur. Quand ma grand-mère disait d’une personne qu’elle était noble, ce n’était pas le nom de famille seulement, c’était surtout la noblesse de caractère. Ça voulait dire, une personne pudique, véridique et loyale, qui savait garder les secrets et qui n’allait pas tout dévoiler sur la place publique au moindre malentendu.
Quand vous entendiez parler de bonne éducation, ça voulait dire une famille, où chaque personne connaissait sa place. Les enfants écoutaient et respectaient les parents et les anciens, les cadets respectaient les ainés, etc.
Vous savez l’adage dit que même la langue et les dents qui sont obligées de cohabiter se querellent quelquefois, lorsque les dents mordent la langue, donc il est normal d’avoir des malentendus, mais la pudeur qui nous défendaient de tomber dans les excès d’insultes, semble avoir disparue. Ce n’est pas toutes les familles bien sûr, mais elle s’est assez généralisée pour qu’on s’en inquiète.

NYELENI Magazine : Arrivez-vous à inculquer à vos enfants et petits-enfants, ces valeurs transmises par la grand-mère?
Anna Dao : Oui. J’imite ma grand-mère et je parle aux enfants. Je les mets à l’aise et tous savent qu’avec tantie Anna il n’y a pas de sujets tabous. Toute conversation est une occasion de transmission d’un savoir que ce soit l’histoire du Mali, un pan de la vie de la grand-mère, la politique, etc.

NYELENI Magazine : En Amérique est-il possible de transmettre cela et comment?
Anna Dao : Oui, bien sûr. Tout dépend de la volonté. Comme je l’ai dit plus haut, j’ai l’obligation de transmettre aux jeunes ce que j’ai appris. Et ces valeurs incluent comment se comporter pour ne pas être insupportable pour les autres et soi-même. Il y a un adage que j’aime beaucoup et qui pour moi résume l’importance d’une bonne éducation: « si tu fais de ton enfant un commandant il viendra te réclamer le paiement de l’impôt ».
Si grâce à Dieu, je me suis très bien adaptée à la vie aux États-Unis, c’est parce que je n’ai jamais oublié qui j’étais et d’où je venais. Mes parents et ma grand-mère ont veillé à me donner des valeurs et des principes qui me permettent de vivre partout dans le monde. Et comme nos griots chantent: « à l’étranger personne ne connaîtra ta lignée, mais tout le monde reconnaîtra un bon enfant — un enfant bien élevé ».

NYELENI Magazine : En français, le titre donne quoi?
Anna Dao : Le titre du livre a une histoire. Dans la grande famille de la grand-mère, j’étais connue sous l’appellation « Ba ou Ténin Lalla ka Anna. » C’est ce que j’ai traduit en y ajoutant Finding, qui veut dire trouver. Une interprétation du titre serait Trouver La Anna que voyait Lalla. La grand-mère voyait surtout mes qualités. Et ce livre est une quête où se retrouver veut simplement dire accepter de vivre en paix avec sa propre humanité, c’est-à-dire, ses qualités et ses défauts. Lalla aimait dire: « tu ne peux pas chercher à plaire à Dieu et aux hommes. Cherche Dieu et cesse de regarder les humains. »

NYELENI Magazine : Le livre est en anglais, il y aura une traduction ?
Anna Dao : Oui, In Shaa Allah à l’avenir.

Maïmouna TRAORÉ

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *