LE LUPUS ÉRYTHÉMATEUX SYSTÉMIQUE (LES)

Le 10 Mai de chaque année est dédié à une maladie très mal connue chez nous, il s’agit du Lupus systémique. C’est quoi cette maladie rare qui s’attaque à l’ADN ? Qui sont les personnes qui en souffrent ? Quel est le traitement ? Nous avons posé ces questions et bien d’autres au Dr Docteur Bouréïma KODIO, Rhumatologue, spécialiste des maladies des os, articulations, muscles, tendons et des maladies systémiques, Promoteur de la Clinique Primum Non Nocere sise à Faladiè.

NYELENI Magazine : Qu’est-ce que le Lupus érythémateux systémique ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le lupus érythémateux systémique (LES) est une maladie auto-immune touchant différents organes, particulièrement la peau, les articulations, le sang, les reins et le système nerveux central. Le mot « auto-immune » signifie qu’il s’agit d’un trouble du système immunitaire qui attaque les propres tissus du patient au lieu de protéger le corps contre les bactéries et les virus. Le nom « lupus érythémateux systémique » remonte au début du 20e siècle. Du latin « lupus » signifie « loup » en référence aux éruptions cutanées faciales en « masque de loup ». Le mot « érythémateux » est d’origine grecque et signifie « rouge » ; il se réfère à la couleur rouge des éruptions cutanées. Le mot « systémique » signifie que la maladie touche de nombreux organes.

NYELENI Magazine : Comment reconnaître les symptômes de la maladie ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le lupus est une maladie très polymorphe qui débute habituellement par un cortège de signes qui s’associent progressivement, en quelques jours ou quelques semaines. Il peut s’agir

  • D’une atteinte cutanée initiale le plus souvent, comportant des rougeurs (érythèmes) se localisant symétriquement sur les pommettes, les ailes du nez, autour des yeux et parfois sur le front : en « ailes de papillon » en « vespertilio », c’est-à-dire en aile de chauve-souris). Ces rougeurs peuvent s’étendre au décolleté et toucher le dos des mains et des avant-bras.
  • D’une photosensibilité (rougeur de peau à type de « coup de soleil » après une exposition modérée au soleil) et d’une alopécie
  • D’une ulcération buccale, nasale, génitale et sècheresse oculaire, buccale et génitale
  • D’une atteinte articulaire qui inaugure souvent la maladie. Il s’agit de douleurs articulaires inflammatoires pouvant t gêner le sommeil, et entrainer un enraidissement douloureux, surtout matinal à la mise en route des articulations. L’atteinte articulaire concerne en priorité les mains et les poignets
  • D’une atteinte des séreuses qui peut aussi être révélatrice .il s’agit d’une inflammation qui touche les feuillets qui entourent le poumon (pleurésie) ou le coeur (péricardite).
  • D’une atteinte rénale qui peut s’exprimer par des gonflements des pieds et visage, et la présence de protéines ou de globules rouges dans les urines
  • D’une atteinte neurologique et psychique : convulsions, dépressions, psychose, épilepsie, AVC
  • D’une atteinte sanguine : baisse du taux d’hémoglobine (anémie), de globules blancs (leucopénie), de plaquettes (thrombopénie) et trouble de la coagulation sanguine
  • D’autres atteintes plus rares : digestive (pancréatite, hépatite…), cardiovasculaire (atteinte des valves du cœur, inflammation du muscle cardiaque à type de myocardite, thrombose artérielle ou veineuse aussi appelée phlébite) , obstétricales ( avortements a répétions, stérilité, échec de fécondation in vitro)
  • D’une présence des auto-anticorps antinucléaires, anticorps anti-ADN natif avec des concentrations élevées dans le sang.
  • D’une grosse fatigue, parfois de la fièvre au long cours.

NYELENI Magazine : Est-ce une seule forme de maladie ou il y en a plusieurs ?

 

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Retenons essentiellement 2 formes de lupus : le lupus spontané, qui survient sans facteurs inducteurs, connus ou reconnus et le lupus induit, qui est provoqué par la prise prolongée de certains médicaments. Le lupus spontané, se subdivise en 2 sous-groupes :

  • Le lupus cutané (pur) au cours duquel l’atteinte est limitée à la peau (sans risque pour un organe vital)
  • Et le lupus systémique qui est une maladie qui peut toucher plusieurs organes ou appareils (la peau, les articulations, les reins, le coeur, les vaisseaux…)

Ces différences s’expliquent probablement par le fait que le lupus n’a pas UNE « cause », mais il est la conséquence de plusieurs « causes » encore mal connues qui diffèrent selon les patients.

 NYELENI Magazine : Est-ce une maladie génétique ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le lupus est une maladie multifactorielle qui résulte de la rencontre d’un terrain particulier et de facteurs de l’environnement (les ultraviolets du soleil, les hormones et les virus) et certains médicaments. Des variants de nombreux gènes, en modifient un peu leur fonction, induisent une susceptibilité génétique. Ces « originalités génétiques » semblent liées à de petites différences (appelées polymorphismes) qui caractérisent certains gènes de l’immunité. Quand elles s’additionnent (d’où le terme « maladie multigénique »), elles favorisent l’apparition des perturbations du système immunitaire.

NYELENI Magazine : Comment se fait le diagnostic ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le diagnostic de lupus repose sur l’association des signes cliniques (qui peuvent varier d’un patient à l’autre) et des tests sanguins et urinaires. Certains signes sont très évocateurs de la maladie (les lésions cutanées) et d’autres le sont moins car ils existent aussi dans d’autres maladies auto-immunes (arthrites, péricardites…). Afin de distinguer le LES des autres maladies, des médecins du Collège Américain de Rhumatologie (American College of Rheumatology) ont dressé une liste de 11 critères qui aident à classer la maladie.

NYELENI Magazine : Quel est le taux de pourcentage des malades de Lupus dans notre pays et l’âge moyen ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le lupus érythémateux systémique (LES) est reconnu dans le monde entier. Il semble que la maladie soit plus fréquente chez les personnes d’origine afro-américaine, hispanique, asiatique ou amérindienne. En Europe, environ 1 personne sur 2.500 est atteinte du LES. Les femmes en âge de procréer (de 15 à 45 ans) sont les plus touchées et, au sein de ce groupe, la proportion des femmes touchées par rapport aux hommes est de 9 pour 1. A l’instar des autres pays africains, le Mali ne dispose pas d’étude la prévalence du LES en population générale. Toutefois le nombre de patients suivis dans nos structures   avoisine les 600.

NYELENI Magazine : Pouvez-vous nous parler du traitement ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : La variabilité des symptômes explique pourquoi la prise en charge et le traitement d’un lupus seront adaptés à chaque patient. Toutefois les traitements actuels visent à contrôler les symptômes du LES, et à prévenir les complications de la maladie. Il s’agit du traitement symptomatique (anti-inflammatoires non stéroïdiens et corticothérapie) et du traitement a base d’antipaludiques de synthèse, d’immunosuppresseurs et biothérapie.

NYELENI Magazine : Quel est votre conseil pour les malades et ceux qui viennent de découvrir cette maladie ?

Dr Docteur Bouréïma KODIO : Le LES n’est pas une fatalité.  La maladie, si elle est diagnostiquée et traitée de manière appropriée à un stade précoce, se stabilise dans la majorité des cas et entre en rémission (absence de tout signe ou symptôme de LES). Cependant, le LES est une maladie chronique qui impose  un suivi médical régulier et un  traitement permanent. Nous conseillons aussi l’éviction l’exposition excessive aux rayons du soleil/rayons UV pouvant déclencher ou aggraver le LES. Les grossesses doivent être planifier avec les soignants. Aucun régime alimentaire ne peut guérir le LES. Toutefois, un régime alimentaire sain et équilibré est recommandé.

 Propos recueillis par Maïmouna TRAORE

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