Dans un monde où les réseaux sociaux jouent un rôle central dans la formation des identités, de nombreuses jeunes filles choisissent de se mettre en scène à travers des vidéos et des snaps (un snapchat est un moyen rapide et amusant de partager un moment avec la famille et les amis). Cependant, ces choix soulèvent des questions cruciales sur le respect de soi et l’autoperception. En effet, un phénomène préoccupant en émerge : des jeunes femmes utilisent des morceaux de musique qui non seulement ne les valorisent pas, mais les dénigrent ouvertement. Ces chansons, parfois explicitement insultantes, deviennent pourtant la bande sonore de leur contenu en ligne.
Pourquoi certaines jeunes femmes choisissent-elles de promouvoir du contenu qui porte atteinte à leur propre dignité ? Pour comprendre ce comportement, il est nécessaire de se pencher sur la pression sociale et l’influence des tendances actuelles. Dans un environnement où la validation sociale est souvent mesurée par le nombre de «likes» (aimer) et de partages. Certaines peuvent se sentir poussées à suivre les tendances, même si cela va à l’encontre de leur propre intérêt.
Pourquoi faire la promotion des artistes et des morceaux qui les dénigre ou qui portent atteinte à leur dignité alors que des générations de femmes ont consacré leur vie à lutter pour le respect et les droits des femmes ? Des militantes ont consacré leur vie à se battre pour une représentation plus juste et équitable de la Femme dans tous les aspects de la société. Elles ont consenti d’énormes sacrifices pour créer un environnement où les femmes sont respectées pour leur compétence, leur talent et leur contribution à la société, plutôt que pour leur apparence ou leur désir de se conformer ou s’identifier à des stéréotypes dévalorisants.
«C’est triste de voir que certaines jeunes filles ne réalisent pas à quel point elles se dévalorisent en faisant des vidéos. Le respect commence par soi-même. Comment peuvent-elles exiger du respect des autres si elles ne se respectent pas d’abord ?», s’est interrogée Bintou Camara, agent commercial d’une société de la place. «Je comprends que les réseaux sociaux soient un moyen de se divertir. Mais, il y a des limites. Ces jeunes filles devraient penser à l’image qu’elles renvoient. Cela non seulement pour elles-mêmes, mais aussi pour leurs familles et les générations futures», déplore Amadou Singaré, un commerçant. «Je pense que ces filles cherchent simplement à s’amuser et à s’intégrer dans un groupe. Peut-être qu’elles ne réalisent pas l’impact de leurs actions. Il est important d’éduquer et de sensibiliser plutôt que de les blâmer», pense Aminata Bagayoko, une étudiante qui tente de nuancer le débat.
Pour certaines jeunes filles, les vidéos et snaps réalisés sur des morceaux dénigrants sont avant tout un moyen de se divertir. Pour elles, ces actions n’ont pas de lien direct avec des questions de respect ou d’autoperception. «Nous faisons ces vidéos juste pour nous amuser. Certes, tout le monde ne voit pas les choses de manière négative. Mais, nous sommes jeunes et c’est une manière pour nous de nous exprimer, de faire partie d’une communauté en ligne. Cela n’a rien à voir avec le respect de la femme ou autre chose. C’est juste du fun», se défend Inah Sangaré, une nouvelle bachelière, défend.
Un «simple divertissement» qui peut négativement impacter l’avenir
«Je pense qu’il ne faut pas toujours tout dramatiser. Ces vidéos ne sont qu’un passe-temps pour nous. Elles nous permettent de nous détendre et de nous connecter avec nos amis. Ce n’est pas une question de respect ou d’irrespect, c’est juste un moyen pour nous de nous amuser et de profiter de notre jeunesse», assure Fatou Sow, étudiante en communication.
Ce comportement (à la limite de l’autodérision), bien que perçu comme un simple divertissement par certaines, peut avoir des conséquences à long terme sur l’image de soi, sur la perception publique des femmes… En se mettant en scène de façon dégradante ou sur des morceaux dénigrants, ces jeunes filles contribuent involontairement à la normalisation de contenus qui les rabaissent. À long terme, cela peut renforcer des stéréotypes négatifs et perpétuer des attitudes sexistes affectant non seulement leur propre respect de soi, mais aussi la manière dont elles sont perçues par les autres.
Cette «légèreté apparente» peut ainsi se transformer en un cercle vicieux compromettant progressivement le respect dû à la Femme. Le dilemme du respect et de l’autoperception reste complexe et à multifacette. Les jeunes femmes doivent donc être encouragées à se valoriser et à faire des choix qui reflètent leur respect de soi. Cependant, il est également essentiel de comprendre les raisons pour lesquelles elles adoptent certains comportements afin de pouvoir mieux les guider vers des alternatives leur permettant de s’exprimer et de préserver leur dignité. La lutte pour le respect des femmes ne se limite pas à des actions visibles, mais commence dans la manière dont chacune d’elle se perçoit et se valorise au quotidien.
Sory DIAKITÉ