En avril prochain, l’émission « Musoya » aura un an sur les ondes de la Radio Liberté. A l’occasion du mois de la femme, nous avons rencontré la productrice de ladite émission, la communicatrice chevronnée Coumba Bah Traoré. Interview
NYELENI Magazine : L’émission «Musoya» aura bientôt 1 an en avril, dites-nous qu’elle est la différence entre elle et les autres émissions de société ?
Coumba Bah : MUSOYA™ est une émission enregistrée auprès du Bureau Malien des droits d’auteurs – BUMDA – qui cherche l’équilibre entre les humains à travers l’éducation et la sensibilisation sur les sujets de société. Contrairement à son nom, MUSOYA ne parle pas que de ‘FEMME’ car pour nous très peu de sujet sinon rien n’est que FEMME, là où la femme est concernée l’homme aussi l’est. Les sujets de femmes sont des sujets de société. L’Emission est interactive et diffusée sur les ondes de la la Radio Liberté en direct tous les samedis de 10h à 12h avec des rediffusions tous les dimanches à 10h et les mercredis à 17h. En plus de la radio, toutes les émissions sont streamed live sur facebook et aussi postées sur la chaine youtube et le site web de l’émission www.musoya.com
NYELENI Magazine : Comment est préparée l’émission, parce que, nous avons compris que vous parlez des problèmes de société, mais nous voyons qu’il y a une journée spéciale pour les femmes battantes, celles que nous appelons des MUSO Cesirilen (femmes battantes)?
Coumba Bah : Oui tous les derniers samedis du mois, nous avons une rubrique spéciale MUSO Cesirilen qui vise à la promotion des femmes battantes, des femmes qui ne sont pas nécessairement connues mais qui ont su se développer et aider à développer autrui dans des domaines pas très évidents. Des femmes qui sont considérées comme pionnière dans leur domaine. En générale, bien qu’excellentes dans leur activité professionnelle, elles arrivent aussi à attacher plusieurs autres ceintures ‘d’où le Cesiri’ pour concilier activités professionnelle, sociale et familiale.
En plus de cette rubrique, nous avons également une deuxième qui a été lancée le mois de février 2018 – MUSO ni Politiki – pour sensibiliser, éduquer et faire un plaidoyer sur l’importance de la participation et de la représentation politiques des femmes. Le MALI devrait tenir trois élections cette année, avec la Loi N°2015-052 du 18 décembre, nous sommes désormais obligé-es légalement de respecter et céder au moins 30% des postes électifs et nominatifs à l’un-e d’entre nous soit aux hommes soit aux femmes. Mais ce qui est sûr et souhaitable car durable serait de nous voir collectivement de plein gré accepter et promouvoir la place des femmes dans toutes les instances de décision. Avec MUSO ni POLITIKI, MUSOYA jouera donc sa partition pour cet éveil de conscience et cette volonté populaire et citoyenne de voir et accepter les femmes à côté des hommes, avec les hommes animer la vie de la cité.
NYELENI Magazine : On vous savait fonctionnaire à ONU Femmes, aujourd’hui vous animez « Musoya », peut-on savoir pourquoi ce changement ?
Coumba Bah : De 2014 à 2017, j’ai effectivement eu à accompagner ONU FEMMES en tant que Consultante. Le bureau du Mali venait d’être changé en Représentation avec des ambitions programmatiques plus étoffées. Il était important d’élaborer des stratégies de communications et de partenariats adaptés pour accompagner la mise en œuvre de ces programmes. C’est donc dans ce cadre, au vu de mes expériences et compétences particulièrement au sein de la société civile, que j’ai donc accepter de contribuer dans l’élaboration et ensuite de la mise en œuvre des stratégies de communication et de mobilisation des ressources de ONU Femmes au Mali.
Je remercie ONU Femmes et tous ses partenaires pour la confiance et l’opportunité de servir. Mais il n’y pas eu de changement, le changement s’il en a eu c’est peut-être au niveau de qui m’aide à assumer mes charges financières à la fin du mois. Car, mon cœur et mon âme travaillent en premier pour moi-même, la quête de l’équilibre homme/femme, la lutte contre l’inégalité entre les sexes demeure toujours au centre de toutes mes actions.
NYELENI Magazine : Comment se fait la sélection de vos invités-ées ?
Coumba Bah : La sélection des invités_es se fait surtout par recommandation. Après entretien avec les personnes on décide ou non de la synergie. Les hommes aussi bien que les femmes sont les bienvenu-es. Et jusque-là MUSOYA a accueilli beaucoup plus d’hommes sur le plateau que de femmes. Car les émissions thématiques sont quand même deux semaines sur quatre dans le mois. A part MUSO_Cesirilen qui est 100% femmes toutes les autres semaines ce sont les hommes qui sont en nombre élévé. MUSO ni Politiki aussi a un expert permanent sur les questions électorales qui anime avec nous.
La participation des hommes majoritairement est très importante pour nous. Au Mali, nous sommes dans des communautés patriarcales, où les décisions sont majoritairement prises par les hommes qui sont les chefs de nos familles. Il est donc primordial, que les hommes s’approprient de la problématique de l’égalité entre les sexes et les droits des femmes et des filles.
NYELENI Magazine : En tant que communicatrice, animant une émission très écoutée aujourd’hui, pensez-vous qu’avec l’implication des leaders religieux dans ces émissions, certains comprendront mieux le rôle et la place de la femme dans le développement durable ?
Coumba Bah : Oui sans aucun doute. Mais cela prendra du temps, mais il ne faut pas se décourager. Ce qui est aussi un handicap ceux sont les différentes tendances au sein des religions. Par rapport aux genres, aux droits fondamentaux des femmes, on peut constater que certains leaders sont plus flexibles, plus ouverts que d’autres avec différentes interprétations sur différents aspects et cela peut apporter des confusions au sein des populations. Mais qu’à cela ne tienne, l’implication des leaders de nos grandes religions musulmanes, chrétiennes ou africaines a sa place si nous voulons atteindre l’équilibre tant souhaité entre les hommes et les femmes. On ne connait pas beaucoup certes, mais avec le peu que nous avions entendu et appris, il nous parait clair que chacune de ces trois religions exige le respect de l’être humain et l’égalité de droits entre les êtres, même si le concept de complémentarité est plus souvent celui avancé au lieu d’égalité.
NYELENI Magazine : Quel est votre point de vue sur les différentes formes de violences que subissent les maliennes, surtout quand elles se soldent par la mort des victimes ?
Coumba Bah : TRISTE plutôt que révoltant. La violence pour moi est un comportement appris. Personne ne nait violent. Pour moi, nous devrons collectivement et individuellement changer nos regards et nos croyances sur les femmes et les filles, les voir plus en concitoyennes, en personnes à part entière, en créatures divines, en complémentaires et égales de l’homme et du garçon. Aussi, l’éradication de la violence surtout conjugale, passera nécessairement pas l’éducation des garçons, leur préparation à la vie de couple, leur préparation à devenir des maris responsables et non des rois ni comme des demi-dieux ; les garçons doivent être formés et préparés à assumer et porter ce lourd fardeau que semble être un chef de famille… être un homme, un bon homme, père de famille, mari protecteur semble être assez lourd et chacun devrait y être former pour assumer avec dignité et responsabilité tout en gérant le très grand stress que j’imagine devrait aller avec.
NYELENI Magazine : Ensemble, femmes de la presse que pouvons-nous faire, si malgré les sensibilisations ces violences continuent, souvent, nous en sommes mêmes victimes ?
Coumba Bah : Parler, aider à briser le silence. Raisonner avec la tête et non le cœur. Oui, certaines en sont victimes, sont des survivantes mais étant des médias, on se doit aussi d’analyser en profondeur sans parti pris. Cela est important à mes yeux, et les acteurs et les personnes victimes et survivantes de violences sont aussi nous-mêmes, nos concitoyen-nes, nous nous devons donc de rester au juste milieu.
NYELENI Magazine : Votre souhait pour la deuxième année de «Musoya» ?
Coumba Bah : Plus d’auditeurs et d’auditrices, plus de feedback de nos populations afin de nous aider à nous améliorer constamment. Petit à petit, ensemble main dans la main, nous construirons ce nid confortable ou tous les maliennes et les maliens se développeront avec toutes leur potentialités ou le sexe ou le genre de l’un ou de l’autre ne sera vu comme abject mais plutôt comme une aubaine, une opportunité de bien-être et de bon vivre collectif.
Propos recueillis par Maïmouna TRAORE